Un jour de honte pour l'Egypte, Zvi Mazel ancien ambassadeur au Caire
Via http://israel-chronique-en-ligne.over-blog.com/
Le grand bâtiment au six de la rue Abdel Malek, sur la rive occidentale du Nil, est bien connu de tous les cairotes. Du haut de son dix-neuvième étage, le drapeau israélien y flottait sereinement depuis ce jour de 1981 où il fut hissé pour la première fois au cours d’une émouvante cérémonie.
Ere de paix
Israël avait voulu y voir l’aube d’une nouvelle ère de paix, non seulement avec l’Egypte, mais encore avec tous ses voisins. Il n’en fut rien. Une paix glaciale et une presse déchainée firent leur œuvre. Alors le bâtiment a eu beau accueillir génération après génération de diplomates israéliens, recevoir quotidiennement la visite d’égyptiens et de palestiniens en quête d’assistance consulaire ou de visa, voir défiler des chefs de mission étrangers venus échanger idées et informations avec leur collègue israélien, le malaise demeurait et faisait craindre que quelque chose finirait par arriver. Ce qui fut malheureusement le cas. La semaine dernière, il se trouva un égyptien « héroïque » pour arracher le drapeau à son mât, le jeter au sol et le piétiner avant d’y mettre le feu sous les applaudissements de la foule. Le lendemain toute la presse publiait sa photo à la une et le gouverneur de Giza en personne lui décernait une récompense.
La grande Egypte au passé glorieux s’était trouvé un héros. Pas un philosophe, non, ni un savant, pas un entrepreneur talentueux ; pas même un joueur d’échec ou un sportif de haut niveau. Non, le héros de l’Egypte d’aujourd’hui est un casseur qui grimpe aux murs pour aller souiller le drapeau d’un pays voisin pour la plus grande joie d’une foule en délire. Une foule qui, encouragée par la presse et forte du soutien du gouverneur est passée à l’attaque vendredi soir.
Remplir ses engagements
Le monde entier a pu constater que la grande Egypte était incapable de remplir ses engagements, de respecter les conventions internationales et d’assurer la sécurité d’une représentation diplomatique. C’est une leçon qui ne sera pas oubliée de si tôt, comme ne seront pas oubliées les images de la meute enragée se ruant à l’assaut du bâtiment, fracassant la porte de l’ambassade et se livrant à des actes de vandalisme. Des images qui ne sont guère propices à encourager les investissements ou le tourisme alors que l’Egypte a plus que jamais besoin de la compréhension et de l’assistance internationale pour son économie en perdition.
L’Egypte se trouve à la croisée des chemins. Les grandes manifestations de foule, la chute de Moubarak n’ont pas abouti à la moindre amélioration de la situation économique et sociale. Le Conseil Militaire Suprême à la tête du pays a montré l’étendue de sa faiblesse. Il n’a pas su offrir au peuple une voie nouvelle : rédaction d’une nouvelle constitution, élection d’institutions parlementaires et surtout mise en chantier des réformes urgentes. Bien au contraire, la situation ne fait qu’empirer. Faute de tradition libérale, Il ne s’est pas trouvé de formation pour prendre en main la révolution et la canaliser vers un régime démocratique assurant le respect des droits de l’homme et celui des minorités ainsi que l’égalité de la femme.
La haine d’Israël
Les Frères Musulmans et les ultranationalistes laïcs – longtemps victimes de la politique répressive du gouvernement Moubarak – se sont emparés de la rue ; tout en se combattant entre eux pour le contrôle de l’Egypte de demain, ils dictent leurs volontés à l’armée. Les jeunes si pleins d’idéalisme, qui avaient courageusement manifesté pour réclamer justice sociale et progrès économique, ont été balayés. Il ne reste plus qu’une seule force pour unir un pays profondément divisé : la haine contre Israël.
Pourtant aujourd’hui plus que jamais l’Egypte doit reprendre en main une économie défaillante pour donner nourriture et espoir à ses 80 millions d’habitants. Une tâche gigantesque qui demande la stabilité assurée par la paix avec Israël. Ces deux pays voisins, qui ont une si longue frontière commune, doivent collaborer pour repousser les groupes terroristes menaçant cette frontière. Hors de la lumière des projecteurs, un dialogue au plus haut niveau est à l’œuvre en ce sens avec l’assistance discrète des Etats Unis. En dépit de la crise actuelle les uns et les autres doivent garder la tête froide et s’employer à faire retomber la tension. Pas facile, certes, mais ils n’ont pas le choix.